Réédition d'un petit succès de librairie qui a formé une nouvelle génération d'universitaires

Réédition d'un petit succès de librairie qui a formé une nouvelle génération d'universitaires

A l'occasion du Salon du Livre et de la Presse de Genève qui s'ouvre ce 30 avril 2014, les Presses polytechniques et universitaires romandes (PPUR) ressortent une nouvelle édition de l'ouvrage coécrit par trois membres du PRN LIVES: son directeur Dario Spini, le chef de l'IP8 Eric Widmer, ainsi que Marlène Sapin, qui vient de rejoindre l'IP15.

Puisant abondamment dans le matériel accumulé depuis plusieurs années dans le cours « Approches disciplinaires des parcours de vie » des Universités de Genève et Lausanne, le livre Les parcours de vie, de l'adolescence au grand âge est sorti pour la première fois en 2007 alors que ses auteurs appartenaient encore au Centre lémanique d'étude des parcours et modes de vie (Pavie), réseau de chercheurs qui a donné naissance au Pôle de recherche national LIVES. Imprimé alors à 2160 exemplaires, l'ouvrage est aujourd'hui épuisé. Les éditions PPUR ont donc décidé de le rééditer car la demande ne faiblit pas.

« Il accompagne tous nos étudiants », se réjouit Dario Spini, directeur du PRN LIVES. Autre motif de satisfaction, l'ouvrage a été traduit en italien et a paru en 2010 aux éditions Il Mulino sous le titre I Percorsi di vita.

« L'édition 2014 est actualisée avec des statistiques plus récentes ainsi que de nouveaux résultats de recherche », indique Marlène Sapin, encore assistante de recherche à l'époque de la première sortie, et devenue entre-temps docteure en sciences sociales, chercheuse au Centre de compétences suisse en sciences sociales FORS et membre de l'IP15 du PRN LIVES. Elle mentionne également la référence dans le livre à des recherches en cours, comme l'étude Vivre-Leben-Vivere (VLV) sur les seniors menée conjointement par le PRN LIVES et le Centre interfacultaire de gérontologie et d'études des vulnérabilités (CIGEV) de l'Université de Genève.

Résumé de l'éditeur

De la naissance à la mort, les existences individuelles suivent des cheminements qui, loin d'être déterminés par la seule volonté ou le hasard, s'inscrivent dans des causalités sociales et psychologiques fortes. Les auteurs, psychologues et sociologues, se fondant sur de vastes enquêtes réalisées en Suisse, aux Etats-Unis et en Allemagne, apportent un éclairage original sur les « parcours de vie ». De l'adolescence au grand âge, cet ouvrage analyse les étapes et les transitions marquant ces trajectoires, en soulignant les défis propres à chacune et les stratégies d'adaptation déployées par les individus. Si ces trajectoires sont marquées par des contraintes biologiques et le contexte historique, elles le sont tout autant par l'horloge sociale qui, tant du point de vue familial que professionnel, rappelle à chacun son heure. De cette combinaison d'influences se dégagent, dans toute leur complexité, les « parcours de vie » caractéristiques du temps présent.

Photo eminavn © iStock

Investissement social: des lions qui buttent sur l’effet Matthieu en rêvant d’être papillon

Plusieurs images tirées de la zoologie et des Evangiles ont été utilisées au cours de la conférence internationale « Evaluer la stratégie d’investissement social » organisée à et par l’IDHEAP avec le soutien de l’Université de Lausanne et du Pôle de recherche national LIVES. L’occasion de belles joutes rhétoriques et théoriques sur des questions de fond : comment l’Etat social peut-il endiguer durablement la précarité, et comment mesurer ces efforts ?

Ils n’ont pas tranché... Mais disséqué, comparé et questionné, oui ! La quarantaine de chercheurs et chercheuses venus débattre des politiques d’investissement social à Lausanne les 10 et 11 avril 2014 sont repartis avec de nouvelles pistes de travail, enrichis de différentes méthodes et perspectives.

« Nous avons débouché sur plus de questions que de réponses, mais le but de ce colloque n’était pas d’offrir des recettes. C’est une discussion scientifique qui avance. Et il faut accepter que la recherche n’est que rarement directement utile », a confié à l’issue de l’événement le principal organisateur, Prof. Giuliano Bonoli, se disant très satisfait des échanges occasionnés.

Dès l’ouverture de la conférence, il a insisté sur la question clé : « Quelle est la capacité de l’investissement social d’atteindre les plus désavantagés ? » Ce fameux « effet Matthieu » tant redouté - ainsi dénommé en référence à la phrase de l’évangéliste : « Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l'abondance, mais à celui qui n'a pas on ôtera même ce qu'il a » - a hanté l’ensemble du colloque et s’est représentée sans trouver de véritable réponse lors de la table ronde finale.

Une piste pour l'universalité

Pour les uns, comme Gøsta Esping-Andersen, qui a donné une conférence plénière très suivie le premier jour, la solution ne fait pas de doute : « Nous devons mettre l’argent [sous entendu ‘des politiques sociales’] dans les enfants : personne ne pourrait tirer un tel rendement à la bourse ! » Mais comment faire pour viser véritablement les plus pauvres ? - lui a demandé une participante. « Les classes supérieures doivent tirer avantage du système d’accueil préscolaire pour être d’accord de le financer », a répondu le célèbre sociologue danois, offrant ainsi une première piste.

Ce credo n’a cependant pas convaincu tous les orateurs, telle Bea Cantillon, de l’Université d’Anvers, qui persiste à penser que l’investissement social ne doit pas être la priorité des politiques sociales. Comparant les investissements sociaux aux lions, « dangereux pour les faibles », elle a déclaré préférer les éléphants, « lents et protecteurs », ainsi qu’elle se représente l’Etat-providence. Une autre voie existe encore du côté des papillons, a-t-elle ajouté pour symboliser l’innovation sociale, ou autrement dit les politiques locales d’activation venant de la base, « mais les papillons sont trop volatiles »… « Il faudrait mélanger les trois approches », fut finalement sa conclusion.

Au cours des deux jours de colloque, de nombreuses communications ont démontré le poids du contexte régional, les limites de l’analyse en fonction des données disponibles, et la difficulté d’évaluer les résultats de l’investissement social sans disposer de réelles possibilités de contrôle. « Nous essayons de torturer les données », reconnaît Giuliano Bonoli, tout en précisant que « la recherche contribue à faire évoluer les indicateurs, et donc le monitoring, par exemple en élargissant la notion de seuil de pauvreté à la question de l’exclusion sociale. »

Mesurer le non investissement

Malgré les doutes et les questions en suspens, quelques certitudes sont venues conclure ces deux jours de réflexion à l’heure de la table ronde. « Les pays qui ont pratiqué l’investissement social sont ceux qui s’en sont le mieux sortis pendant la crise », a déclaré Lieve Fransen, directrice des politiques sociales et du programme Europe 2020 à la Commission européenne. « En coupant dans l’éducation, l’Espagne a fait tout le contraire : c’est à mon avis la voie du désastre », a-t-elle ajouté. Son vœu est que la recherche sur l’investissement social fournisse davantage d’outils de mesure et d’argumentation aux politiques : « Mesurer l’impact du non investissement serait un chantier de travail important pour le monde académique ! »

Enfin, à la question de départ de savoir si l’investissement social pourrait dépasser l’effet Matthieu afin de ne pas bénéficier qu’aux plus privilégiés, les positions sont restées prudentes, mais consensuelles. Certains ont même avancé que verser des allocations aux plus pauvres pourrait être vu comme une forme d’investissement social, puisque sans cela les enfants des bénéficiaires n’auraient plus aucune perspective.

L’ensemble des participants à la table ronde a ainsi reconnu que protection sociale et investissement social sont complémentaires et ne sauraient s’exclure mutuellement. « Nous avons besoin des éléphants et des lions. Et nous soutenons aussi les papillons ! », a glissé malicieusement Ludwig Gärtner, vice-directeur de l’Office fédéral des assurances sociales. Il a cependant invité les chercheurs à prendre en compte les contraintes budgétaires des Etats et le poids de l’opinion publique : « Les idéologies sont très fortes en Suisse sur les questions tournant autour de la famille et de la petite enfance », a-t-il mis en garde.

Carottes et bâtons

Pour les organisateurs, les pistes qui restent à creuser ne manquent pas. « Il ne faut pas penser que le seul but de l’investissement social est d’être rentable pour l’Etat. Il sert aussi la stabilité et la cohésion sociale », affirme Giuliano Bonoli. Le professeur avoue que certains points encore peu traités par la recherche pourraient déboucher à l’avenir sur des contractions internes, comme la question des incitations pour accéder aux prestations d’investissement social : « Faut-il prévoir des bâtons en plus des carottes ? » Le débat continue…

Le Télégramme

« Le travail familial de soin aux personnes âgées en situations de vulnérabilité »

Conférence publique de la sociologue Françoise Le Borgne-Uguen organisée par la Haute école de travail social et de la santé | EESP | Lausanne et le Pôle de recherche national LIVES le 21 mai 2014 à 17h30. L’événement sera suivi le lendemain par un colloque sur le maintien à domicile.

Françoise Le Borgne-Uguen, Maître de conférences à l'Université de Bretagne occidentale à Brest, présentera une synthèse de résultats de plusieurs de ses recherches centrées sur les modes d'exercices et les fondements du travail familial de santé produit par des enfants et des conjoint-e-s auprès d'un de leurs parents.

Cette conférence constitue une excellente introduction au colloque « Perspectives du maintien à domicile » du 22 mai, où les résultats de plusieurs recherches réalisées récemment sur le maintien à domicile seront présentés. Des professionnel-le-s de terrain et des responsables politiques seront invités à venir discuter avec les chercheurs et les chercheuses de ces résultats ainsi que des pistes à élaborer pour l'avenir.

  • Entrée libre sans inscription pour la conférence de Mme Le Borgne-Uguen
  • Inscription demandée pour le colloque sous le lien www.eesp.ch/vieillesse (délai : 16 mai 2014)

Les deux événements auront lieu à la Haute école de travail social et de la santé | EESP, chemin des Abeilles 14, 1010 Lausanne.

Photo Felix Imhof

La recherche suisse en sciences sociales contribue activement à de grandes enquêtes internationales

Au cours des derniers mois, le Prof. Dominique Joye a intégré les comités méthodologiques de trois importantes études internationales. Le chef de l’IP15 du PRN LIVES, professeur à l’Université de Lausanne et également chercheur associé au Centre de compétences suisse en sciences sociales FORS, explique l’intérêt de se retrouver au cœur de ces organisations scientifiques.

« C'est une tâche passionnante que de participer à la mise en œuvre d'une enquête internationale comparée : de voir où des problèmes méthodologiques sont les mêmes, mais aussi en quoi ils peuvent diverger suivant les contextes ; bref, de réfléchir sur les points essentiels qui permettent de faire des enquêtes de qualité dans différents pays, tout en préservant la possibilité de comparer, et donc d'avoir des mesures pertinentes ».

Cette profession de foi émane du Prof. Dominique Joye, chef de l’IP15 du Pôle de recherche national LIVES, récemment élu au sein des comités méthodologiques de trois enquêtes internationales en sciences sociales :

Pour Dominique Joye, par ailleurs vice-doyen de la Faculté des Sciences sociales et politiques à l’Université de Lausanne et partenaire du Centre de compétences suisse en sciences sociales FORS, les raisons de sa participation à de tels projets sont multiples, tant du point de vue individuel que collectif.

« La mise à disposition rapide de données, caractéristique de ces enquêtes internationales, permet de rendre plus facilement cumulatifs nos travaux scientifiques », indique le chercheur. Il a notamment à l’esprit la formation de la relève académique : « Pour les doctorants, il est plus facile de se frotter aux techniques d'analyse les plus pointues si l'on dispose de données comparables. »

Intérêt pour la Suisse

Du point de vue de la Suisse, ajoute le Prof. Joye, « cela permet de se situer en référence à d'autres pays, de connaître l'état des choses et de faire ressortir des caractéristiques propres. Cela peut porter tant sur des caractéristiques objectives, comme par exemple la proportion de femmes qui travaillent à temps partiel, que sur des éléments subjectifs, comme la manière dont elles le vivent. »

Il évoque encore d’autres questions de recherche où il serait intéressant de comparer la Suisse à d’autres pays, par exemple sur les inégalités sociales, les sentiments xénophobes, etc. Autant de thèmes qui font écho aux préoccupations du PRN LIVES…

« C'est quand même pas mal de voir la Suisse au cœur de la méthodologie de ces très grandes enquêtes internationales », se réjouit le chef de l’IP15.

 A l’heure où la Suisse montre des signes de repli et où sa participation aux projets de recherche européens est partiellement remise en question, l’information méritait en tout cas d’être partagée.